LA RESTRUCTURATION DE FRET SNCF EST ENGAGéE

Sous les huées d'une centaine de manifestants, la SNCF a lancé vendredi la restructuration de la société Fret SNCF, menacée par une procédure de Bruxelles, qui doit conduire à la création d'une nouvelle société moins importante.

Fret SNCF risque de devoir rembourser une dette de 5,3 milliards d'euros considérée par la Commission européenne comme une aide d'Etat illégale, ce qui mettrait cette entreprise immédiatement en faillite.

La solution retenue pour éviter une telle issue prévoit que la société disparaisse pour être remplacée par une nouvelle entité, en cédant au passage 20 % de son activité à des concurrents.

"Ce qui nous arrive n'est pas de notre fait, ce n'est pas une décision d'entreprise", a déclaré le directeur général de Fret SNCF, Jérôme Leborgne, devant les manifestants rassemblés devant le siège de l'entreprise où la direction présentait son "plan de discontinuité" devant le comité social et économique (CSE).

"C'est une décision qui s'impose à nous, qui vient de loin dans le temps et qui s'est décidée entre Bruxelles et l'Etat", a poursuivi M. Leborgne, sous les cris de "démission ! démission !"

"Je comprends l'inquiétude et la colère des cheminots. Cette affaire est vraiment un choc d'autant plus que, pendant deux ans en 2021 et 2022, on a été positif en marge opérationnelle pour la première fois grâce à l'engagement des cheminots", a-t-il souligné.

Mais "entre une procédure créant de longs mois d'incertitude pour l'entreprise et pour ses salariés, une procédure qui peut conduire à rembourser une somme mortelle, et un accord rapide et protecteur, la responsabilité est de choisir la seconde voie", a écrit le ministre délégué aux Transports Clément Beaune, dans une tribune au Monde, vendredi.

Le plan présenté à Bruxelles par l'Etat français prévoit la création le 1er janvier 2025 d'une nouvelle société, baptisée pour l'instant New Fret. Elle doit reprendre la "gestion capacitaire", c'est-à-dire les trains que compose Fret SNCF avec les wagons de ses différents clients, qui ne formeraient pas des convois rentables s'ils étaient pris isolément. Ces activités représentent 80 % du chiffre d'affaires et 70 % du trafic de Fret SNCF.

"C'est une famille"

Une autre société, New Maintenance, doit s'occuper de la maintenance comme son nom l'indique. Cette activité n'était d'ailleurs pas incluse dans Fret SNCF avant la réforme ferroviaire lancée en 2020.

Un actionnaire minoritaire, que Paris espère public, doit entrer au capital de ces deux nouvelles entités, qui seront rattachées à la division de transport ferroviaire de marchandises du groupe SNCF, Rail Logistics Europe, avec les autres filiales Captrain, Naviland Cargo, VIIA et Forwardis.

Il n'y aura "aucun licenciement, ni de personnels au statut (de cheminot, NDLR), ni de contractuels", promet la direction.

Près de 3.900 personnes doivent être transférées automatiquement chez New Fret et 500 à New Maintenance.

Quant aux 450 agents travaillant sur les "trains dédiés", trains de marchandises réguliers qui doivent être confiés à des concurrents, ils seront réaffectés dans le groupe SNCF ou prêtés aux nouveaux opérateurs s'ils sont volontaires.

"Il est hors de question de conduire pour une entreprise privée", a assuré vendredi Mikaël Meusnier, agent de Fret SNCF depuis 26 ans et syndiqué à la CGT.

"On s'est toujours battu pour cette entreprise. C'est une famille. Il est hors de question de se séparer de quelques membres de la famille", a-t-il lancé.

La manifestation, à l'appel des syndicats CGT-Cheminots, Unsa ferroviaire, SUD-Rail et CFDT-Cheminots, n'a pas empêché la tenue de la réunion du CSE.

"On nationalise les pertes et on privatise les profits", a dénoncé Fabien Villedieu pour SUD-Rail.

"Il faudrait que le gouvernement ait du courage et dise à la Commission européenne que si on veut que les camions arrêtent de circuler et soient transférés sur le rail, il faut aider les entreprises ferroviaires", a-t-il estimé. "Pour qu'il n'y ait plus de camions, il faut qu'il y ait du train et pour qu'il y ait du train, il ne faut pas commencer par affaiblir le principal opérateur."

La direction espère récupérer "d'ici trois-quatre ans" les 750 millions d'euros de chiffre d'affaires que réalise actuellement Fret SNCF. "En 2030, on sera plus gros qu'aujourd'hui parce que le marché est porteur", prédit un dirigeant.

02/06/2023 19:04:33 -          Saint-Ouen (AFP) -          © 2023 AFP

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